Une nouvelle étude relie le développement prématuré des neurones humains à certaines maladies du développement du cerveau

Cortex de souris (en bleu) transplanté avec des neurones humains (en vert)
Cortex de souris (en bleu) transplanté avec des neurones humains (en vert)

 

Leuven, le 7 Août 2024 - Les mécanismes responsables des déficiences intellectuelles et des troubles du spectre autistique (DI/TSA) restent largement inconnus. Des chercheurs des laboratoires des professeurs Pierre Vanderhaeghen et Vincent Bonin du VIB, de la KU Leuven et du NERF ont découvert que des mutations dans un gène appelé SYNGAP1 perturbent le développement prolongé des neurones humains, considéré comme essentiel à la fonction cognitive normale. Ces travaux publiés dans la revue Neuron ont des implications importantespour notre compréhension et le développement de traitements pour déficiences intellectuelles et des troubles du spectre autistique (DI/TSA) .

Le cerveau humain se distingue parmi les mammifères par son développement remarquablement prolongé. Contrairement à d’autres animaux, les neurones de notre cerveau, en particulier ceux du cortex cérébral – le principal site des fonctions cognitives – mettent des années à atteindre leur pleine maturité. Ce processus, connu sous le nom de néoténie, fait en sorte qu'une partie de notre cerveau reste longtemps immature, ce qui serait essentiel au développement de certaines des fonctions cognitives avancées caractéristiques de notre espèce. Les perturbations de ce développement prolongé pourraient ainsi être à l’origine de certaines formes de déficience intellectuelle et d’autisme. Mais jusqu’à présent, cette hypothèse n’avait jamais été testée sur les neurones humains.

Une fenêtre sur le cerveau en pleine maturation

Des études précédentes avaient montré que les mutations du gène SYNGAP1 sont parmi les causes les plus fréquentes de déficience intellectuelle associée à l'autisme. Cependant, les effets spécifiques de sa perturbation sur les neurones corticaux humains restaient largement inconnus. Jusqu'à récemment, un obstacle majeur à l'étude des maladies du développement du cerveau humain était le manque de méthodes expérimentales fiables pour observer le développement des neurones corticaux humains dans un cerveau vivant.

Aujourd’hui, des scientifiques du VIB-KU Leuven Center for Brain & Disease Research et du NERF (Neuro-Electronics Research Flanders, IMEC, KU Leuven et VIB) ont révélé que SYNGAP1 est crucial pour le développement prolongé "néotenique" des neurones corticaux humains. Cela établit un lien entre l’accélération du développement neuronal et certaines formes de maladies neurodéveloppementales.

Pour étudier comment la mutation SYNGAP1 affecte le développement des neurones humains in vivo, les chercheurs ont développé et utilisé un modèle de xénotransplantation : ils ont greffé des neurones humains portant la mutation SYNGAP1 dans le cerveau de souris et ont ensuite étudié leur développement et leur fonction.

Plus vite ce n'est pas mieux

Les chercheurs ont examiné les effets de la mutation des neurones humains transplantés dans le cerveau de souris au niveau des circuits neuronaux, c'est-à-dire les connexions entre les neurones qui remplissent des fonctions spécifiques dans le cerveau.

 

« Nous avons observé que les neurones mutants SYNGAP1 semblaient normaux pour la plupart des aspects, mais qu’ils présentaient une forte accélération de leur développement. Le plus frappant, c'est qu'ils se connectaient beaucoup plus rapidement avec d'autres neurones », explique le Dr Ben Vermaercke, premier auteur de l'article.

En particulier, le Dr Vermaercke et ses collègues ont découvert que les neurones déficients s'intégraient plus rapidement dans les circuits corticaux et répondaient aux stimuli visuels plusieurs mois avant le calendrier de développement normal, ce qui indique que la maturation plus rapide des neurones conduisait à une fonctionnalité précoce des neurones dans les circuits cérébraux. .

Le Professeur Pierre Vanderhaeghen ajoute : « Ce développement accéléré des neurones mutants SYNGAP1 pourrait altérer la fonction précoce et la plasticité des circuits cérébraux au cours des toutes premières années de vie, même si cela nécessite d'être étudié plus en profondeur par des investigations expérimentales et cliniques. Notre travail suugère un rôle important de la néoténie dans le développement normal du cerveau humain et met en évidence la manière dont sa perturbation pourrait conduire à des maladies neurodéveloppementales. ​ Des défauts précoces dans le développement des neurones corticaux humains pourraient avoir des implications importantes pour le diagnostic et les traitements des patients affectés par SYNGAP1, et potentiellement chez les patients présentant d'autres formes de déficience intellectuelle ou d'autisme.»
Le Professeur Vincent Bonin conclut : « Le modèle de transplantation que nous avons développé permet, pour la première fois, d'étudier les maladies neuronales humaines in vivo tant au niveau fonctionnel que des circuitsneuronaux. Cette avancée constitue un modèle prometteur pour comprendre les maladies neurologiques et tester de nouveaux traitements. »

Publication

SYNGAP1 deficiency disrupts synaptic neoteny in xenotransplanted human cortical neurons in vivo. Vermaercke, Iwata, et al. Neuron, 2024. DOI: 10.1016/j.neuron.2024.07.007

Funding

Ce travail a été soutenu par : Research Foundation Flanders (FWO), le Conseil Europeen de la Recherche (NEUROTEMPO), la Fondation GENERET, le C1 KU Leuven Internal Funds Programme, le Programme EOS, ERANET EPINEURODEVO, NSC-Reconstruct la Fondation Médicale Reine Elizabeth.

 


India Jane Wise

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Science Communications Expert, VIB

Joran Lauwers

Joran Lauwers

Science & Business Communications Expert, VIB


About the VIB-KU Leuven Center for Brain & Disease Research

Scientists at the VIB-KU Leuven Center for Brain & Disease study how brain cells are organized and how they communicate with each other. These mechanisms reveal and provide insights into what goes wrong in brain diseases such as Alzheimer's, Parkinson's, ALS, and dystonia. This basic work should ultimately lead to new drugs for use against these currently incurable diseases.

About NERF

Neuro-Electronics Research Flanders (NERF) is a not-for-profit academic research initiative empowered by imec, KU Leuven and VIB, with the ultimate goal of forming a thorough understanding of brain function at multiple levels of detail ranging from cells and circuits to behavior. New insights into the operation of brain circuits are empowered by the development of novel technologies that integrate neurobiology and nano-scale engineering. NERF develops novel electronic, chemical and optical tools to monitor and manipulate brain circuits with high spatial and temporal resolution. More info: www.nerf.be.

 

 

 

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